Tengchong, Xanadu
Les vacances du nouvel an sont arrivées plus tard que prévu cette année, la faute au nouvel an chinois qui tombe entre fin janvier et début février. Tout ça c'est une histoire de calendrier : les chinois utilisent le calendrier lunaire parce que, vous savez, ils veulent jamais faire comme les autres ces gens là...
On m'avait pourtant prévenu de réserver le billet longtemps à l'avance si j'escomptais trouver la fuite dans un pays chaud et ensoleillé. Je n'ai pas écouté les avertissements. Soit ! J'ai payé pour ma hardiesse ! Tous les billets pour les Philippines, la Thaïlande et autre régions tropicales étaient devenus hors de prix à l'approche des fêtes. Pour vous dire que j'en ai pris conscience : je commence déjà à rechercher des billets pour février prochain.
Heureusement que les vieux roublards connaissent le pays. C'est mon beau père qui a eu l'idée d'aller passer les fêtes dans le Yunnan, à Tengchong. Et je dois dire que je lui en suis reconnaissant pour le coup.
Au début, ça ne m'emballait pas trop. Déjà le Yunnan, c'est la région que je connais le mieux en Chine, en plus une région volcanique ça ne me tentais vraiment pas... C'est vrai quoi ! Quand on parle de « région volcanique », on s'imagine un ciel rouge et des coulées de laves comme le dernier niveau de Super Mario. Mais quand on a eu l'occasion d'aller étudier les volcans au lycée, on apprend avec désarrois qu'il s'agit, ni plus ni moins, de montagnes avec un trou sur la tête. Quand on a vu le trou, on a tout vu.
Cependant, deux chose m'attiraient dans cette région, la première était les bains chauds, expérience qui s'avérera assez similaire à celle des volcans : pas à la hauteur de mon imagination. La seconde était que la ville se trouvait à 50 kilomètres de la frontière Birmane, pays qui est entré au centre de toutes mes convoitises depuis que j'ai lu ce bouquin nommé « Birmane » il y a un an. J'allais sans aucun doute me frayer en chemin à coup de machette ou de corruption et traverser frauduleusement la frontière pour prendre d'incroyables photos qui révèleraient au monde la véritable face du Myanmar ! Mais pour le moment, nous nous dirigions vers Tengchong sur un vol direct de la Sichuan Airlines.
Arrivé sur place la première impression fut éblouissante. Je ne sais pas si vous avez déjà essayé de passer six mois dans une cave obscure avant de sortir brusquement à la lumière du jour, mais l'effet fut sensiblement le même. J'avais si longtemps vécu à l'ombre de Chengdu, que j'en avait oublié l'existence de cette boule jaune qui flotte dans le ciel et qu'on appelle communément « soleil ». Je le sentais qui irradiait tout autour de moi et qui brulait ma peau. Malgré la douleur du premier contact, je me sentais heureux parce que j'avais retrouvé mon ombre ! Oui, putain ! J'avais retrouvé mon ombre !
Une fois arrivé je n'ai pas été déçu. La ville est à l'image de Dali ou Lijiang : une vieille ville détruite à trois ou quatre reprises et reconstruite à l'identique à chaque fois. C'est plus facile que de restaurer après tout. Sauf que cette fois, il n'y avait pas de touristes. Et ça, ça change tout ! En se baladant près de la rivière, on pouvait voir ceci.
Comme je vous le disais plus haut, les bains chauds sont l'apanage de Tengchong. Nous y sommes donc allé de notre petite séance. J'appréhendais ça comme un jacuzzi naturel au milieu de la montagne, vous savez avec des marmottes et des pâquerettes. Et bien en Chine, il en est tout autrement ! Les chinois qui sont pourtant si sociaux préfèrent, cette fois, l'intimité d'une petite pièce nauséabonde. Nauséabonde, parce que le souffre ça pue d'autant plus dans un espace fermé. Au centre de cet assemblage de parpaing, il y a un trou plein d'eau qui fait des bulles. Quand on y met le doigt, on se brule. Il convient donc de faire couler l'eau froide pendant un certain temps avant de s'y immerger. Par dessus le trou d'eau, une ampoule pendant nonchalamment ferait fuir n'importe quel Claude François. On s'y prélasse comme des tourteaux pendant une heure, mais finalement ça finit par devenir pénible et on n'est pas fâché d'en sortir.
Le reste du temps, on s'est baladé ça et là, un volcan par-ci, un musée par-là. J'ai finalement abandonné l'idée d'aller en Birmanie. L'entreprise semblait un peu trop aventureuse. Par contre, j'ai eu l'occasion de rencontrer plusieurs birmans réfugiés, notamment un vendeur qui avait fui les militaires six ou sept ans auparavant et qui vendait des panier en rêvant du jour où il pourrait rentrer dans son village. Quelle connerie la guerre !
La famille de Min est resté une semaine de plus que nous. Ils ont eu l'occasion d'aller y faire un tour. Ils ont passé le poste de douane sans aucun problème. Ce qui est formidable avec un passeport chinois c'est qu'il permet d'entrer dans tous les pays inaccessibles aux autres (Corée du Nord, Myanmar etc...) mais il ne permet pas d'entrer dans presque tout le reste du monde.
Mais ce que j'ai pu voir de plus beau ici, c'est sans nul doutes la petite bourgade marécageuse de Hehua. C'est la France d'il y a cent ans, les bœufs tirent la charrue pour labourer la terre et les briques des maisons sont fabriquées dans de grands fours moyenâgeux. Les gens vivent simplement et ont l'air plutôt heureux. La région exploite la pierre de façon artisanale. Voici par exemple à quoi ressemble une petite carrière.
On s'est enfin aventuré dans la tourbière qui borde la ville. C'était juste magnifique. On marchait sur un lac. A chaque pas, nos pieds s'enfonçaient profondément et c'est toute la tourbière qui s'enfonçait avec eux. C'était une sensation vraiment extraordinaire.
Et pour finir, voici quelques photos des véhicules post-nuke qu'on peut apercevoir dans le Yunnan. C'est juste parce que je suis fan !
